| 17/09/2006 RÉVOLTE 
                DES CROATESInauguration 
                du parc-mémorial
 de Villefranche-de-Rouergue
  
                Allocutions prononcées à l'occasion de la cérémonie commémorative
 le 17 septembre 2006
 Villefranche-de-Rouergue (Aveyron)
     Intervention 
                de Monsieur Serge ROQUESDéputé-Maire de Villefranche-de-Rouergue
  
                Monsieur 
                le Premier Ministre de la République de Croatie, 
                Monsieur 
                le Ministre des Affaires étrangères de 
                la République française,
 Madame 
                l’Ambassadrice représentant le Gouvernement 
                de Bosnie-   Herzégovine,
 Madame le Vice-Premier Ministre de Croatie et Monsieur 
                le Ministre de la   Culture de Croatie,
 Monsieur l’Ambassadeur de Croatie en France,
 Monsieur l’Ambassadeur de France en Croatie,
 Monsieur le Préfet d’Istrie,
 Madame la Préfète et Monsieur le Sous-Préfet 
                d’Aveyron,
 Monsieur le Ministre, Sénateur, Président 
                du Conseil Général de l’Aveyron,
 Mesdames les Conseillères Régionales, 
                représentant de Président du Conseil 
                  Régional Midi-Pyrénées,
 Messieurs les Présidents des Groupes d’Amitié 
                Croatie-France au Sabor,   croate et à 
                l’Assemblée Nationale,
 Messieurs les Anciens Combattants de Croatie et de 
                France,
 Madame le Colonel, Déléguée Militaire 
                en Aveyron,
 Monsieur le Maire de Pula et ses collaborateurs,
 Mesdames et Messieurs les élus régionaux, 
                départementaux, municipaux,
 Messieurs les Capitaines de Gendarmerie,
 Monsieur le Capitaine des Sapeurs-Pompiers,
 Monsieur l’Architecte du site,
 Mesdames et Messieurs les chefs de service et dirigeants 
                d’entreprises, Mesdames et Messieurs,
  
                Il y a 63 ans, jour pour jour, le 17 septembre 1943, 
                se déroulait, ici-même, un événement 
                horrible et insupportable qui nous rassemble tous aujourd’hui : 
                le massacre barbare, par des troupes nazies, fanatiques 
                et sans pitié, et l’ensevelissement sommaire 
                de près d’une centaine de jeunes gens, 
                à peine sortis, de l’enfance, venus de 
                l’autre extrémité du continent 
                européen.  
                 La 
                veille, avait eu lieu un fait incroyable qui restera 
                unique dans les annales de la deuxième guerre 
                mondiale : la mutinerie dans un bataillon Waffen-SS 
                de jeunes gens enrôlés de force, venus 
                de Croatie et de Bosnie-Herzégovine.  
                L’exécution de cinq officiers allemands 
                rendait les mutins maîtres de la situation, pendant 
                quelques heures, ce qui a fait écrire aux historiens 
                que Villefranche de Rouergue, fut symboliquement la 
                première ville libérée de la métropole.  
                Ils affirmaient ainsi, au péril immédiat 
                de leurs jeunes et fragiles vies, la dignité 
                éminente et inaliénable de tout être 
                humain qui refuse l’asservissement des corps 
                et des esprits.  
                Mais, le retournement devait être, hélas, 
                sanglant et brutal.  
                Les nazis, dès qu’ils le purent, à 
                l’aide de renforts extérieurs, anéantissent 
                tous ces jeunes gens téméraires qui leur 
                avaient fait si peur.  
                Ces héros sont toujours enterrés ici, 
                après avoir été suppliciés 
                et abattus, soit sur place, soit en ville, soit dans 
                les locaux où ils étaient prisonniers. 
                De nombreux autres mourraient ensuite en particulier 
                en déportation. Ces évènements 
                sont de portée nationale en Croatie et en Bosnie-Herzégovine.  
                Ici, ils ont marqué au fer rouge la mémoire 
                de la cité.  
                Dès l’arrivée des troupes allemandes, 
                le 12 août, de nombreux Villefranchois sont choqués 
                par le traitement brutal et humiliant, voire bestial, 
                qu’infligeaient les nazis à ces jeunes 
                hommes.  
                Le 17 septembre, nos compatriotes firent ce qu’ils 
                purent en cette année 1943, qui fut sans doute 
                la plus noire de l’occupation, pour protéger 
                et cacher dans la bastide, les révoltés 
                qui avaient pu échapper aux griffes mortifères 
                de leur bourreau.  
                Certains, trop rares, hélas, purent ainsi gagner 
                quelques jours après la campagne avoisinante 
                et les maquis de la Résistance.  
                Cette révolte faisait reposer aussi immédiatement 
                sur le Maire Louis 
                FONTANGES, une responsabilité écrasante 
                et redoutable.  
                Dans un pays occupé où l’administration 
                était neutralisée, il était de 
                fait et en fait, la seule personnalité susceptible 
                de protéger la population. Il avait comme seule 
                arme, son autorité morale acquise sur les champs 
                de bataille de la grande guerre.  
                La ville a sans doute risqué son existence même, 
                car il n’y a pas d’autre exemple semble 
                t-il en France, qu’un événement 
                aussi meurtrier pour l’occupant, n’ait 
                pas entraîné, aussitôt, de terribles 
                représailles sur la population civile toujours 
                soupçonnée de complicité.  
                L’ombre d’Oradour sur Glane a réellement 
                plané sur Villefranche de Rouergue, et elle 
                doit en grande partie au courage de Louis Fontanges, 
                qui n’a pas hésité à se 
                constituer prisonnier en sa mairie et à se porter 
                garant de la population, d’avoir évité 
                cette terrible perspective ou du moins la déportation 
                de centaines de personnes, comme ce fut le cas près 
                d’ici, à Figeac par exemple.  
                Les Villefranchois sortirent bouleversés de 
                ces journées dramatiques, beaucoup avaient entendu 
                les fusillades et vu la dizaine de cadavres qui jonchaient 
                les rues de la ville, certains enfants même, 
                ont assisté, pétrifiés dissimulés 
                derrière des buissons aux sommaires et sinistres 
                exécutions.  
                Et, jusqu’à la Toussaint qui a suivi, 
                des mains anonymes et déjà maternelles, 
                sont venues à plusieurs reprises, malgré 
                l’interdiction du Maire, qui craignait toujours 
                de lourdes représailles, déposer des 
                fleurs sur la fosse toute fraîche du massacre.  
                C’est pour rappeler ce geste, que la mère 
                de bronze qui veille désormais sur ces enfants, 
                est entourée d’une pelouse fleurie.  
                Après la guerre, une stèle, présentée 
                comme provisoire et très simple, venait rappeler 
                le sacrifice.  
                Chaque 17 septembre, des cérémonies dépouillées 
                se déroulaient, en présence des élus 
                municipaux, des représentants des pays concernés 
                et des anciens combattants croates et français.  
                Cependant, les statues promises et exécutées 
                pour Villefranche de Rouergue, en 1952, par le sculpteur 
                croate de grand talent Vanja RADAUS ne peuvent rejoindre 
                la France sous l’ancienne Yougoslavie.  
                Pendant ces longues années, la ville entretient 
                le lieu et le « sanctuarise » en quelque 
                sorte.  
                Nous sommes donc très satisfaits lorsque son 
                Excellence l’Ambassadeur de Croatie en France, 
                Monsieur Bozidar GAGRO, se saisit du problème 
                et le soumet à son Gouvernement, il y a deux 
                ans environ.  
                Dès lors, sous sa puissante impulsion, tout 
                va très vite et je remercie infiniment le Gouvernement 
                Croate d’avoir voulu et permis ce monument, après 
                avoir obtenu l’accord du Gouvernement Français.  
                Le Gouvernement Croate a fait le don à la ville, 
                de la réplique de ces magnifiques et très 
                émouvantes statues, ainsi que les dalles blanches 
                qui rappellent dans les deux langues, le drame.  
                Le projet nous avait été présenté, 
                à Jean PUECH et à moi-même au Ministère 
                de la Culture à ZAGREB en présence de 
                Monsieur Bozo BISKUPIC Ministre de la Culture par l’architecte 
                croate de grand renom Ivan PRTENJAK. Il nous a d’emblée 
                séduits.  
                Nous gardons tous les deux un souvenir extraordinaire 
                de ce séjour où nous avons eu le grand 
                honneur d’être reçus en audience 
                successivement par Monsieur le Premier Ministre, Monsieur 
                Ivo SANADER puis par le Président de la République 
                de Croatie lui-même, Monsieur Stjepan MESIC.  
                Ce sont des grands moments pour nous et je veux encore 
                une fois remercier le Gouvernement Croate et des plus 
                hautes autorités, de la qualité exceptionnelle 
                de leur accueil dans leurs pays qui a attiré 
                et enchanté plus de 600 000 français 
                cette année.  
                Je suis naturellement très heureux et très 
                fier d’accueillir ici notre Ministre des Affaires 
                Etrangères Monsieur Philippe DOUSTE-BLAZY. Je 
                le remercie beaucoup, malgré le contexte international 
                très chargé, dans lequel la diplomatie 
                française et son chef jouent un rôle capital, 
                très recherché, d’avoir bien voulu 
                nous consacrer ces moments. Le Gouvernement Français 
                a appuyé dès la départ ce projet 
                et c’est le Ministère des Affaires Etrangères 
                qui nous a accordé une subvention pour le mener 
                à bien. Sans son accord et son appui, bien entendu, 
                rien n’aurait pu se faire et nous lui en savons 
                gré.  
                Notre reconnaissance va aussi au Gouvernement Bosniaque, 
                directement concerné par l’origine de 
                nombreuses victimes et qui a bien voulu s’associer 
                à cette démarche avec la venue en particulier 
                de sa très charmante Ambassadrice Son Excellence 
                Zeljana ZOVKO à Villefranche de Rouergue, aux 
                côtés de Monsieur GAGRO, dès septembre 
                2005.  
                Sa présence donne toute la mesure et tout son 
                sens à l’évènement qui concerne 
                finalement trois pays européens qui ont eu à 
                affronter le même ennemi lors du dernier conflit 
                mondial.  
                 
                  Message du Président Bosniaque (Sulejman 
                  TIHIC)  
                  « Monsieur le Sénateur,Monsieur le Député-Maire,
  
                  Je vous remercie très chaleureusement de votre 
                  invitation à assister à l’inauguration 
                  officielle du Mémorial dédié 
                  aux soldats Bosniens et Croates ayant participé 
                  au grand soulèvement de la division Handzar 
                  de l’Armée Allemande contre les troupes 
                  nazies occupant Villefranche-de-Rouergue.  
                  Etant empêché par les autres obligations 
                  en Bosnie-Herzégovine, je ne pourrais malheureusement 
                  pas être à vos côtés à 
                  cette importante occasion.  
                  Je tiens à souligner à quel point nous 
                  apprécions votre geste qui permettra à 
                  préserver la mémoire de ces hommes 
                  courageux qui n’ont pas hésité 
                  à sacrifier leurs vies pour l’idée 
                  de liberté.  
                  Nous sommes d’autant plus fiers de ces hommes 
                  courageux, que ce soulèvement a permis à 
                  Villefranche de Rouergue d’être, fût-ce 
                  pour quelques heures, l’une des premières 
                  villes françaises libérée pendant 
                  la deuxième guerre mondiale.  
                  Je me réjouis des liens d’amitié 
                  sincères et profonds qui existent entre nos 
                  deux pays et je suis persuadé que le Mémorial 
                  que vous inaugurez aujourd’hui, pourra contribuer 
                  davantage au rapprochement de nos citoyens qu’à 
                  de très bonnes relations entre la Bosnie-Herzégovine 
                  et le France.  
                  Je vous prie de croire, Monsieur le Sénateur 
                  et Monsieur le Maire, à l’assurance 
                  de ma très haute considération. 
                  » Localement, 
                depuis longtemps, nous voulions aménager dignement 
                le site mais nous n’aurions pu le faire si nous 
                n’avions pas disposé d’un appui 
                départemental. Toujours très attentif 
                à l’histoire de l’Aveyron et à 
                son ouverture sur l’extérieur, Jean PUECH 
                a saisi, à la première minute, tout l’enjeu. 
                Et, tout de suite, il a décidé, avec 
                toute la collectivité départementale, 
                de s’associer avec efficacité et générosité 
                à la construction de ce mémorial. Sur 
                le plan budgétaire, le Département de 
                l’Aveyron a participé à parité 
                avec la Commune. Il nous a également aidé 
                sur le plan conceptuel. Je l’en remercie infiniment.  
                La Région Midi-Pyrénées a bien 
                voulu également s’associer à cet 
                acte de mémoire. Le Président MALVY a 
                tenu à se faire représenter et à 
                nous aider significativement sur le plan budgétaire. 
                Je le remercie très sincèrement.  
                Villefranche de Rouergue, une des dix-huit villes de 
                plus de 10 000 habitants de la Région se 
                sent pleinement Midi-Pyrénéenne et est 
                toujours très sensible à la présence 
                régionale effective sur ses grands dossiers.  
                Je voudrais remercier également la ville de 
                PULA et son Maire d’avoir permis la réplique 
                de ces statues qui ornent son superbe front de mer. 
                C’est une ville magnifique et nous sommes très 
                heureux de pouvoir envisager la possibilité 
                d’un jumelage entre nos deux cités.  
                Ma reconnaissance va enfin à Madame RADAUS, 
                veuve du sculpteur qui a autorisé la transfert 
                de l’œuvre sublime de son mari, ici.  
                Le parc mémorial a pu ensuite voir le jour dans 
                un calendrier extrêmement serré puisque 
                tout à débuté en mai dernier, 
                grâce à la collaboration fructueuse et 
                l’entente parfaite qui a régné 
                entre :  
                - l’Architecte Croate Ivan PRTENJAK qui a conçu 
                l’aménagement de l’ensemble du site, 
                de façon magistrale. Il a été 
                mis à notre disposition par le Gouvernement 
                Croate;  
                - Monsieur Patrice CAUSSE, Paysagiste, diligenté 
                par le Département de l’Aveyron a mis 
                tout son savoir et son art au service du parc;  
                - Nos propres services municipaux : Frédéric 
                RONCERAY Directeur Général des Services, 
                Jean Pierre OLIVIER Directeur Technique, les Services 
                : des Espaces Verts, de la Voirie, des Eaux, des Maçons 
                et du Nettoiement, sans oublier Patrick BRUGEL et les 
                Services Culturels qui ont fait preuve, une nouvelle 
                fois, d’un grand professionnalisme et d’une 
                grande adaptabilité pour faire face aux difficultés 
                d’un chantier qui était nouveau pour eux.  
                Il est vrai qu’ils ont eu à faire à 
                des entreprises très performantes et dynamiques, 
                locales pour la plupart :  
                - Entreprise LAGARRIGUE (travaux publics)- Société EUROVIA (voirie)
 - Société SOTRAMECA (travaux publics)
 - ATELIER ESPACE (coordonnateur Sécurité)
 - Société ITC (étude béton 
                armé)
 - Société ARNAL (électricité)
  
                Je crois que tous ensemble, ils ont été 
                portés et conquis par l’objet « sacré » 
                en quelque sorte de leur travail, qui les a menés 
                à donner collectivement ce qu’ils avaient 
                en eux, de meilleur et de plus profond.  
                Ils nous livrent en tous les cas une œuvre magistrale 
                et saisissante et je veux les en féliciter très 
                chaleureusement. C’est à ce jour le seul 
                monument en France dédié à la 
                mémoire des enfants de Croatie et de Bosnie-Herzégovine.  
                Napoléon Bonaparte, qui a laissé me semble-t-il 
                un souvenir positif en Croatie, disait :  
                 
                  «Il n’y a que deux puissances au 
                  monde : le sabre et l’esprit… A la longue, le sabre est toujours vaincu par l’esprit 
                  »
 A 
                la longue en effet, puisqu’il a fallu deux cents 
                ans de luttes fratricides, depuis cette prophétie 
                impériale pour que l’Esprit de Paix gagne 
                enfin aussi bien en Europe de l’Ouest que chez 
                vous en Europe du Sud-Est.  
                Mais nous ne devons pas oublier à qui nous le 
                devons. Le sacrifice des révoltés Croates 
                et Bosniaques de Villefranche de Rouergue, comme celui 
                de tous ceux qui sont tombés n’auront 
                pas été vains.  
                Il habite nos cœurs et pousse avec force nos esprits 
                à toujours rechercher entre nous l’entente, 
                la coopération et la paix, suivant le triptyque 
                célèbre du Général de Gaulle, 
                pour les partager avec tous les peuples qui habitent 
                notre bien et notre territoire communs : l’EUROPE. 
    
                Intervention de Monsieur Jean PUECHAncien ministre, Sénateur,
 Président du Conseil général de l'Aveyron
  
                    Ce devoir de mémoire 
                qui nous rassemble va plus loin que la simple cérémonie 
                du souvenir.Il 
                exprime à mes yeux l'union des peuples dans 
                un espace européen où se construit inlassablement 
                la paix depuis 60 ans. Aussi, à tous nos invités, 
                j'adresse ma très cordiale et fraternelle bienvenue 
                en Aveyron.
   Le 
                17 septembre 1943 à VILLEFRANCHE-DE-ROUERGUE, 
                ils se sont soulevés, en défiant le pouvoir 
                nazi par une mutinerie au sein même de ce bataillon 
                SS à la triste réputation dans lequel 
                ils avaient été enrôlés 
                de force. Ils 
                se sont soulevés pour ne pas accepter l’inacceptable, 
                pour ne pas subir.
 Ne 
                pas subir ou simplement tolérer une idéologie 
                destructrice. Ne pas subir l’asservissement de 
                l’Homme par l’Homme. Ne pas subir l’horreur.
 Beaucoup 
                en sont morts car la répression fut immédiate.
     Ils 
                sont morts dans les rues de VILLEFRANCHE. Ils sont 
                morts dans les camps de concentration.Ils 
                n’avaient même pas 20 ans. Face à 
                un ordre aussi rigide qu'inhumain, la révolte 
                à mains nues de ces jeunes exprimait le goût 
                de la liberté. Et le goût de la liberté, 
                c'est le goût de la vie.
  
                    La 
                révolte de ces jeunes Croates et Bosniaques 
                et tant d’autres actes de résistance ouvraient 
                en effet sur cette terre d’Aveyron la porte de 
                la liberté qui allait déferler sur la 
                France après tant d’années noires.Ils 
                se sont levés comme d’autres hommes et 
                d'autres femmes l’ont fait de tous temps, à 
                travers le monde, au-delà des appareils et des 
                calculs.
 C’est 
                à l’Histoire ensuite d’analyser, 
                d’expliquer.
 Pour 
                nous, ici et aujourd’hui, il nous revient de 
                saluer l’attitude de ces hommes.
 Ils 
                se sont levés pour dire non au poids de la dictature, 
                non à la haine raciale et religieuse, non à 
                la négation de l’identité des peuples.
 La 
                reconnaissance officielle de cet acte héroïque 
                est désormais scellée dans le bronze 
                et la pierre de ce mémorial. Ce Mémorial 
                est le témoin d’une attitude qui résonne 
                comme une référence : "savoir dire 
                non".
 Ce 
                Mémorial porte le message bien au-delà 
                de ce champ des martyrs.     C’est 
                un message universel de respect de la condition humaine, 
                de la justice, de la fraternité entre les peuples.
 C’est 
                un message de paix.
 Mais 
                pas la paix à n’importe quel prix. En 
                tout cas pas la paix au prix du renoncement à 
                des valeurs.
 La 
                construction de l’Europe, une Europe ouverte 
                à tout son territoire historique, a donné 
                à la paix des fondations solides sur le continent.
  
                    Ces 
                cinquante dernières années, les liens 
                entre les peuples se sont renforcés. Enrichie 
                de ses différences, l’Europe va de l’avant, 
                et doit aller encore plus vite de l'avant, car rien 
                n’est jamais acquis définitivement.  
                    En 
                effet, d’autres menaces sur la paix, d’autres 
                menaces sur la liberté sont apparues. Les actes 
                terroristes aujourd'hui sont là pour nous le 
                rappeler hélas trop régulièrement.Pour 
                ces raisons, le devoir de mémoire que nous accomplissons 
                ce jour est d’une actualité lucide.
     La 
                paix et la liberté ne vont pas d’elles-mêmes.La 
                paix et la liberté ont besoin, à chaque 
                instant, de combattants. De ceux qui savent dire non
  
                * 
                * *  
                    Le 
                17 septembre 1943, c’était ici, à 
                VILLEFRANCHE-DE-ROUERGUE. Je 
                souhaite aussi saluer l’attitude de la population 
                de VILLEFRANCHE-DE-ROUERGUE.
 Avec 
                son maire de l’époque, Louis FONTANGES, 
                elle a su, en ces heures douloureuses, être solidaire 
                des insurgés au risque de terribles représailles 
                allemandes.
 * 
                * *  
                    Je 
                tiens à exprimer la reconnaissance de tout le 
                département envers ceux qui ont donné 
                ce magnifique exemple de courage.  
                    Venus 
                d'autres Pays, ils ont rencontré ici, sur la 
                terre d’Aveyron, une culture de résistance 
                qui a su, en de nombreuses occasions, refuser l’oppression.  
                * * *  
                    Cet 
                évènement douloureux nous a rapprochés.Il 
                nous rassemble aujourd’hui dans un hommage fidèle 
                et respectueux.
 
    
                Intervention 
                de Madame Zeljana ZOVKOAmbassadeur de Bosnie-Herzégovine en France
 Monsieur 
                le Premier Ministre,Monsieur le Ministre des Affaires Etrangères,
 Messieurs les Ministres,
 Monsieur le Président du Conseil Général
 Monsieur le Député-Maire
 Mesdames, Messieurs,
 Tout 
                d’abord je tiens à remercier le Maire 
                de Villefranche-de-Rouergue et le Président 
                du Conseil Général, tout comme les citoyens 
                de cette ville historique pour leur accueil chaleureux 
                à Villefranche-de-Rouergue, ville 
                qui rassemble nos pays.  C’est 
                un grand honneur de m’adresser devant une telle 
                assemblée en ce jour symbolique.  Aujourd’hui, 
                Villefranche-de-Rouergue, ses citoyens et les jeunes 
                révoltés obtiennent finalement le monument 
                que cet événement et ce lieu mérite. 
                 La 
                Bosnie-Herzégovine est un pays qui, malheureusement, 
                a connu de nombreux combats, guerres et conquêtes 
                sur son sol. Souvent aussi son histoire a été 
                écrite d’une manière unilatérale.  Le 
                fait de nier pendant cinquante ans l’histoire 
                et la culture des petits peuples, en ex-Yougoslavie, 
                a engendré des mythes et des préjugés 
                établis dans une histoire sélective enseignée 
                dans les écoles. C’est pourquoi des peurs 
                primaires ont pris la place du dialogue et de la tolérance. 
                Une histoire écrite depuis des lieux souvent 
                éloignés de nos foyers ainsi qu'une utilisation 
                sélective de l'information ont été 
                cause de frustrations durant des nombreuses années. 
                Mais la vérité reste préservée 
                dans les témoignages des gens qui demeurent 
                les vrais témoins de leur époque.
 Les 
                événements historiques qui se sont déroulés 
                à Villefranche-de-Rouergue, première 
                ville brièvement libérée dans 
                la France occupée, marquèrent aussi l’unité 
                des citoyens de cette ville et des révoltés. 
                C’était la lumière face aux forces 
                macabres du nazisme. L’exemple montré 
                par ces courageux révoltés, la révolte 
                contre l’injustice, témoigne aujourd’hui 
                qu’un homme, même dans les plus obscurs 
                moments de l’histoire peut changer le cours des 
                choses. S’il refuse l’injustice et s’il 
                se révolte.  La 
                révolte conduite par ces jeunes gens à 
                Villefranche-de-Rouergue, l’aide apportée 
                par les citoyens de cette ville, son destin tragique 
                dans un pays étranger loin de leurs foyers pouvait 
                être guère plus qu'un épisode historique, 
                peu connu dans leurs pays natals. Or les citoyens de 
                cette ville ont veillé à préserver 
                la mémoire en commémorant cet événement.  
                D'autre part, on ne saurait cependant oublier que plus 
                de quatre-vingt soldats français ont donné 
                la vie pour la paix au cours de la guerre récente 
                en Bosnie-Herzégovine. Le 
                monument en souvenir de leur sacrifice se trouve aujourd’hui 
                à Sarajevo.  
                Grâce à la France et aux Etats-Unis, les 
                accords de paix de Bosnie-Herzégovine ont été 
                paraphés à Dayton et signés à 
                Paris. Le 10e anniversaire des accords de paix 
                Dayton-Paris a été célébré 
                le 14 décembre 2005 à Paris, où 
                le Président Chirac a reçu la Présidence 
                de Bosnie-Herzégovine. Ce fut pour elle l'occasion 
                de lui  
                a renouveler ses remerciements pour le rôle personnel 
                qu'il a joué dans l’établissement 
                de la paix.  En 
                outre, je voudrais rappeler que c'est encore le Président 
                Chirac qui a ouvert la voie à l’intégration 
                européenne de la Bosnie-Herzégovine au 
                cours la conférence du Pacte de stabilité 
                qui s'est tenue en 1999 à Sarajevo. Il a exprimé 
                sa confiance quant à la perspective ouverte 
                à la Bosnie-Herzégovine et à la 
                région de rejoindre l’Union européenne. 
                Au cours du sommet de Zagreb 2000, durant la présidence 
                française de l’Union européenne, 
                il a encore conforté cet espoir et cette motivation 
                en Bosnie-Herzégovine. Et cette vision a accéléré 
                la dynamique de développement du pays, en y 
                approfondissant le dialogue et en y accélérant 
                le processus de réconciliation.  Aujourd’hui, 
                au moment où le rôle de la communauté 
                internationale en Bosnie-Herzégovine se réduit, 
                et où nous sommes sur le point de signer un 
                accord de stabilisation, les liaisons entre nos deux 
                pays sont plus fortes que jamais.   
                La volonté avec laquelle le gouvernement français, 
                et le président Chirac en personne, se sont 
                investi à la fois dans la consolidation de la 
                paix par l'intermédiaire des contingents déployés, 
                que dans la reconstruction de la Bosnie-Herzégovine, 
                a véritablement porté ses fruits.  C’est 
                pourquoi, encore une fois, je remercie la ville de 
                Villefranche-de-Rouergue, ses citoyens et les autorités 
                françaises pour la conservation du souvenir 
                d’un moment lumineux dans l’histoire de 
                notre peuple. Je 
                suis convaincue que ce jour-ci, que notre unité 
                en ce moment, seront aussi une contribution à 
                la construction d’une Europe forte avec une Bosnie-Herzégovine 
                stable, une Europe fondée sur la confiance et 
                le respect mutuel.  La 
                Bosnie-Herzégovine s'attachera pour sa part 
                à montrer que la vérité et seule 
                la vérité doit être le fondement 
                de l’histoire, en veillant à tenir compte 
                de tous les faits historiques, en honorant l'engagement 
                individuel, la justice et la dignité de l’homme, 
                en condamnant les crimes individuels sans pour autant 
                tomber dans le piège de la culpabilité 
                et la responsabilité collective des peuples. 
                 Je 
                vous remercie. 
   Intervention 
                de Monsieur Philippe DOUSTE-BLAZYMinistre français des Affaires 
                étrangères
 Monsieur 
                le Premier Ministre de Croatie,Madame 
                l'Ambassadeur de Bosnie-Herzégovine,
 Monsieur 
                le Député-Maire,
 Monsieur 
                le Sénateur et Président du Conseil général,
 Madame 
                la Conseillère régionale, Madame le Préfet,
 Mesdames 
                et Messieurs,
 Nous 
                sommes réunis aujourd'hui pour commémorer 
                un épisode singulier de la lutte contre l'occupation 
                nazie, dans cette région qui fut un haut lieu 
                de la résistance nationale et qui a écrit 
                des pages glorieuses de la Libération de la 
                France. Les événements du 17 septembre 
                1943 constituent, en effet, un exemple inédit 
                de révolte contre l'occupant nazi.  Inédit 
                parce que la mutinerie de Villefranche-de-Rouergue 
                fut la première rébellion armée 
                de cette ampleur au sein même d'une unité 
                de la Waffen SS. Inédit aussi, et surtout, parce 
                que cette révolte fut conduite par de jeunes 
                Croates et Bosniaques, enrôlés de force 
                à l'été 1943, éloignés 
                de leur pays, trompés et brutalisés par 
                l'occupant nazi au profit d'une cause qui n'était 
                pas la leur. Inédit enfin car pendant quelques 
                heures, grâce à l'action courageuse de 
                ces mutins, Villefranche-de-Rouergue fut, en quelque 
                sorte, une ville libérée dans une France 
                alors occupée.
 Les 
                habitants de Villefranche-de-Rouergue ont été 
                les témoins de ce drame. Ils ont aussi aidé, 
                au péril de leur vie, les autorités municipales 
                en tête, plusieurs de ces révoltés 
                à se cacher, à s'enfuir, et, pour certains 
                d'entre eux, à rejoindre les rangs de la Résistance. 
                Ils ont découvert avec émotion que ces 
                hommes, issus de cultures et de religions différentes, 
                venus sous un uniforme ennemi, dans un pays dont ils 
                ignoraient tout, partageaient avec eux un même 
                combat. Le refus de la tyrannie, le rejet de l'oppression, 
                l'appel de la liberté furent au cœur de 
                leur révolte : ce sont bien là les valeurs 
                qui ont fondé la Résistance, ce sont 
                bien là les valeurs qui ont permis de rassembler 
                l'Europe autour d'un projet commun. La ville de Villefranche-de-Rouergue, 
                pour sa part, n'a jamais oublié ce sacrifice. Au-delà 
                de l'événement historique qui nous réunit 
                ici, je tiens à souligner combien l'hommage 
                rendu à ces jeunes combattants croates et bosniaques 
                est un hommage à tous les adversaires du totalitarisme, 
                aux individus qui ont eu le courage et la volonté 
                de s'opposer. Il s'inscrit également dans le 
                souci d'œuvrer en faveur d'un continent européen 
                pacifié et réunifié autour des 
                valeurs de la démocratie, de l'humanisme et 
                des Droits de l'Homme. Il 
                y a à peine plus de 10 ans, la guerre faisait 
                encore rage en ex-Yougoslavie. Nous avons tous en mémoire 
                les scènes de barbarie, les villes assiégées, 
                les populations déplacées, les territoires 
                ethniquement "purifiés". Ce destin 
                tragique dans lequel semblaient enfermées toutes 
                les nations de l'ex-Yougoslavie est, aujourd'hui, en 
                train de s'ouvrir à une autre perspective, celle 
                de l'Union européenne. C'est une perspective 
                de paix, de démocratie, de prospérité. 
                C'est une perspective qui doit s'appuyer en premier 
                lieu sur la réconciliation des peuples, sur 
                une histoire écrite par les historiens et sur 
                une mémoire partagée. C'est 
                ce message que nous devons tous porter. Vous avez tenu, 
                Monsieur le Premier Ministre, en plein accord avec 
                Monsieur le Député-Maire et Monsieur 
                le Sénateur, à donner un relief particulier 
                à la commémoration d'aujourd'hui. J'y 
                vois pour ma part le souci d'un esprit de réconciliation 
                et le souhait de construire l'avenir en se confrontant 
                avec exigence à l'Histoire. Monsieur 
                le Premier Ministre, Madame l'Ambassadeur, dans votre 
                région d'Europe encore traumatisée par 
                les récents conflits, le souvenir est une épreuve 
                encore souvent douloureuse. Puisse celui des sacrifiés 
                de Villefranche contribuer, soixante-trois ans après, 
                à rejeter à jamais le "mal radical" 
                de l'idéologie nazie. Cette destruction de l'homme 
                par lui-même a ébranlé en profondeur 
                la conscience européenne, comme nous le rappelle 
                Primo Levi. La mémoire de la Shoah et de toutes 
                les victimes du nazisme rassemble les peuples de l'Union 
                européenne. Elle ne se discute pas, elle est 
                un horizon indépassable et imprescriptible. Face 
                au négationnisme et aux falsificateurs de la 
                mémoire, nos peuples doivent aujourd'hui réinventer 
                les chemins de l'intelligence et de l'éducation. 
                Des lieux de mémoire partagés comme le 
                Monument inauguré aujourd'hui y participent 
                grandement. Notre avenir doit se nourrir des leçons 
                de ces épreuves passées en retrouvant 
                la voie de la paix et de l'amitié. Je 
                vous remercie./. 
  
                 Intervention 
                de Monsieur Ivo SANADER Premier ministre de la République 
                de Croatie
 Monsieur 
                le Ministre,Monsieur le Président du Conseil général,
 Monsieur le Député-Maire de Villefranche,
 Excellences,
 Mesdames et Messieurs,
 Chers Amis villefranchois,
  Ici 
                même, il y a 63 ans aujourd’hui, sur ce 
                champ des martyrs, dans les rues de cette ville ou 
                encore durant leur déportation vers les camps 
                de la mort, plus de 150 jeunes gens sont tombés 
                loin de leur patrie. Tous tombèrent pour la 
                liberté. Révoltés contre la tyrannie, 
                ils étaient portés par la force de leur 
                irrépressible jeunesse, mais guidés également 
                par la conviction qu'ils n'étaient pas seuls, 
                et sur le point de rejoindre la Résistance retranchée 
                dans les montagnes environnantes et les forces alliées 
                engagées alors contre le nazisme.
  
                Tout illustre l’héroïsme de leur 
                mort tragique : à la fois le moment et les circonstances, 
                qui font de la révolte un indéniable 
                acte de résistance, le risque assumé 
                de défier la sanguinaire machinerie nazie et, 
                enfin, le destin, qui souvent décide du succès 
                ou de l'échec, de la vie ou de la mort.  
                La résistance au nazisme est faite de nombreux 
                actes héroïques tel celui de Villefranche-de-Rouergue. 
                Celui-ci est cependant unique en son genre : en effet, 
                l'histoire en a retenu qu'il s'agit de la première 
                révolte fomentée au sein de l'armée 
                allemande durant la Seconde Guerre mondiale. Quelques 
                jours plus tard, Radio Londres s’en fit même 
                l'écho. Et de nombreux historiens ont établi 
                son caractère spécifique. Deux points 
                cependant méritent d’être rappelés.  
                En premier lieu, c’est la solidarité manifestée 
                par les Villefranchoises et les Villefranchois à 
                l’égard des révoltés. Bravant 
                le risque de représailles impitoyables, ils 
                leur ont souvent donné refuge et aidé 
                les rares survivants à rejoindre le maquis. 
                Qui plus est, faisant preuve de noblesse et d’unité, 
                la population de Villefranche a continué à 
                cultiver le souvenir de ces événements, 
                passés à la postérité dans 
                l’histoire locale sous le nom de Révolte 
                des Croates. Des premières gerbes de fleurs 
                qu'ils déposèrent en ce lieu même 
                sur leur sépulture, 
                alors anonyme, et ce jusqu’aux honneurs rendus 
                des décennies durant, comme aujourd'hui, au 
                son du Chant des partisans, l'hymne de la Résistance. 
                  
                En second lieu, c’est l'écho que la révolte 
                de Villefranche a rencontré en Croatie, comme 
                en Bosnie-Herzégovine. Celui-ci contrasta jadis 
                sensiblement avec la manière dont elle fut perçue 
                dans la capitale de l'ex-Yougoslavie. Car d’aucuns 
                tenaient le simple fait d'avoir revêtu l’uniforme 
                ennemi, fût-ce sous la contrainte, pour une faute 
                qu’aucun acte de bravoure, aucune conviction, 
                aucun sacrifice ne saurait laver. Et s'ils furent finalement 
                inclus dans la catégorie générale 
                des « combattants yougoslaves », c’est 
                pour n’avoir finalement droit ni à la 
                reconnaissance de leur identité nationale ni 
                à un monument durable, digne de leur héroïsme.  
                En Croatie, en revanche, la révolte de Villefranche 
                est devenue partie intégrante de la mémoire 
                collective. Du fait de l’éloignement géographique 
                du théâtre de ces événements 
                et de leur dénouement tragique, ils suscitèrent 
                une grande attention, tant par ce que l’on en 
                savait que par ce que l’on en ignorait encore. 
                Ainsi, journalistes et historiens commencèrent 
                à se rendre à Villefranche, rassemblant 
                documents et témoignages de la population. Ils 
                furent bientôt suivis d’artistes, qui traduisirent 
                la conscience qu’en avaient conservé les 
                Villefranchois en d’expressives métaphores. 
                A tel point qu'aujourd'hui, les tabous étant 
                levés, chacun reconnaît à ces événements 
                une haute portée symbolique, associant dans 
                un héritage commun nos trois pays ici réunis. 
                Ainsi rayonnera-t-il davantage encore dans la nouvelle 
                Europe.  
                Ceux qui, morceau par morceau, ont assemblé 
                cette mosaïque, qui ont étudié les 
                identités nationales et religieuses des Révoltés, 
                ont établi un fait qui mérite d’être 
                souligné : la fraternité des insurgés, 
                qu'ils fussent de confession musulmane ou catholique 
                – ces premiers étant d’ailleurs 
                majoritaires – n'a à aucun moment été 
                remise en cause. Jamais non plus la moindre division 
                n’est apparue entre eux. Aussi nous incombe-t-il 
                de préserver cette unité.  
                Cette conviction est à l’origine de notre 
                démarche. En dépit des apparences, l'édification 
                de ce monument, associant nos trois pays, n’est 
                pas un retour vers le passé. Certes, nous nous 
                trouvons ici à l'endroit même où 
                ces événements se sont déroulés 
                il y a plus d'un demi-siècle. Néanmoins, 
                nous en tirons des leçons intemporelles, universelles 
                et indéniables, qui restent valables aujourd'hui 
                et gardent toute leur pertinence pour l'avenir. L’amour 
                de la liberté, la lutte contre l’oppression, 
                l’esprit de sacrifice et, avant tout, l’unité 
                fraternelle dans la résistance à la force 
                brutale et à la menace sous toutes ses formes.  
                 Par 
                un concours de circonstance auquel j’ai brièvement 
                fait allusion, ce monument, imaginé en 1952 
                par l'artiste croate Vanja Radauš – qui 
                est aussi l’auteur de ces sculptures –, 
                a certes manqué le rendez-vous fixé avec 
                toute une génération. Mais finalement, 
                il aura été accueilli et reconnu par 
                une autre génération, je veux parler 
                de la nôtre. Pour autant, sa véritable 
                et déterminante rencontre avec la présence 
                spirituelle de tous ces jeunes hommes reposant sous 
                ses blocs de pierre et ses sculptures de bronze a lieu 
                aujourd’hui même. Par cette rencontre-là, 
                le monument ouvre enfin avec les morts un dialogue 
                qui transcende la vulnérabilité des corps 
                et conjure la menace de l'oubli. En les délivrant 
                de leur époque et de toute temporalité, 
                il les assimile, à travers les figures héroïques 
                des Fusillés, à tous les fusillés 
                de l’histoire. De même, la douleur contenue 
                de la Mère Patrie, portant des pommes sur la 
                tombe de ses fils selon la tradition de la région 
                d'origine du sculpteur, symbolise la douleur de toutes 
                les mères du monde.  
                Puisse ce lieu de mémoire éternelle, 
                dédié à ceux qui reposent ici, 
                nous rappeler aussi tous les martyrs où qu’ils 
                reposent ! Puisse-t-il être un lieu de rencontre 
                et de rassemblement, source de nouvelles amitiés 
                et de fraternités nouvelles entre les jeunes 
                générations appelées à 
                consolider les fondements de l'Europe, de notre grande 
                Europe naissante !  
                Pour conclure, Mesdames et Messieurs, permettez-moi 
                au nom du gouvernement croate de remercier très 
                sincèrement le gouvernement français 
                pour son soutien et sa collaboration; le gouvernement 
                de Bosnie-Herzégovine pour son soutien à 
                la concrétisation de cette initiative et, tout 
                particulièrement, la municipalité de 
                Villefranche-de-Rouergue, sous la houlette de M. Serge 
                Roques, ainsi que le Conseil général 
                de l'Aveyron, présidé par M. Jean Puech, 
                pour l'ensemble de leur engagement et leur contribution 
                financière, décisifs pour l’édification 
                de ce monument.  
                Je félicite l'architecte Ivan Prtenjak et ses 
                collaborateurs français pour le talent dont 
                il a fait preuve dans la conception, la réalisation 
                et l'esthétique de ce parc mémorial.  
                Mes félicitations vont également aux 
                villes de Villefranche et de Pula dont je salue le 
                prochain jumelage, en leur souhaitant beaucoup de succès 
                dans leur future coopération.  
                Enfin, à vous tous qui avez répondu à 
                l'invitation de nos hôtes, et dont la présence 
                contribue à rendre ce jour solennel et historique, 
                j’adresse mes profonds remerciements!  
                Je vous remercie.   |